n singulier couteau surveille le fil de ma vie
Je l'ai marqué d'une croix violette
Mon doigt teste régulièrement sa froideur jusqu'au sang
Quand je baisserai la garde, il se repliera
Je pose mot après mot sur la feuille vacante
Ma tête glisse de l'étagère du présent encore une fois
A table revient mon père, ce monstre aux yeux glacés d'une tendresse à moi
Il me tient comme ce matin il tenait le poulet qui allait donner sa vie à la lame
Le même couteau revient glisser sur la miche de pain
Une croix pour là-haut
Et voilà ma tranche
Ma bouche est à peine assez grande pour un tel plaisir
Combien de couteaux faut-il à un homme pour tailler son chemin dans les peines ?
Combien de fois faut-il couper les haies vives de l'amour pour imaginer une clairière ?
Je sais le poids du couteau et la chair qui voudrait s'en passer
Je sais tenir le couteau pour cueillir la rose éphémère
Premier couteau traçant des grimoires d'enfant
Second couteau émondant mes restes de jeunesse
Troisième couteau prêt à découper une part de gâteau à moi destinée
Dernier couteau, je ne sais encore ta violence.