'est une figure foudroyante. Elle s'élève vers le ciel pour tout conquérir, puis ses
lignes reviennent sur elles-mêmes, comme une boite qui voudrait se refermer.
Une boite à petits ou grands démons ?
Je n'en sais rien. Sa toile d'araignée de lignes pures, voilà ce qui m'importe. Elle pourrait
poser entre deux branches d'arbrisseaux voisins. Le soleil illuminerait ses lignes. Ce
serait le matin, en forêt.
La rosée du jour pleure sur la toile, glisse d'une ligne à l'autre comme un doigt léger. Le
trapèze ne sent pas la mousse travaillée par la chaleur, ce petit jour de septembre. On
espère des cèpes, des trompettes de la mort et quelques girolles.
Le trapèze est ramassé. Prêt à bondir. C'est une figure majeure dans le déploiement de
l'intelligence. Une bombe qui fait tic-tac, alerte les autres figures. Je le vois tournoyer au
centre flou de mes pensées, cette bombe, et toutes ses petites sœurs surpuissantes.
Trapèze vient de table. Stable figure, prête à éclater, pourtant, à s'ouvrir sur un monde
autre. Le monde du dehors, au-delà, au-dessus du trapèze. La figure trapèze ne cesse
d'appeler l'ailleurs, dans son enfermement compulsif.
Alors, le poète convoque les images associées, qui ne s'appellent pas rectangle ou carré,
mais bambou, ou nuages, ou bateau-phare. Ou golem, cyclope, plaies, mare croupie,
asymétriades. S'il n'a pas peur du monde bouillant, s'il n'a pas peur de percer l'interface
arachnéenne et glisser vers Pandore.
Sans oublier la lumineuse et puissante épure, intimement liée au cloaque caché, dans une
tension fugace que la rosée du matin appelle à vivre et puis mourir, pour revenir le
lendemain.