ne vilaine nuit, je somnolais en sueur au bord du matin
Je rêvais que je tuais un milliardaire
Un de ces êtres dont le nom entraperçu au détour d'un journal
Coloré, faux et tous sourires provoquait chez moi d'ombrageuses incompréhensions
Je le tuais je ne sais où, sans doute sur un de ces bords de mer que ses congénères et lui ont
Colonisés, annexés et protégés contre nous
Il râlait sur le sable, le couteau dépassait de sa gorge
Je soufflai, repris mes forces en observant les baigneurs indifférents
Envahi peu à peu par la sensation d'une recomposition de l'air et de l'eau
Épiphanie sombre et glorieuse
Je l'avais tué, maintenant je comprenais que j'avais planté en lui ce morceau de fer
Froid comme une prothèse définitive
Non parce qu'il possédait une femme aux seins éternellement bombés
Non parce qu'il m'obligeait à poétiser ma misère
Non pour son nauséabond parfum de certitude
Non pour la pitié dont il était rigoureusement privé
Non pour l'espace autour de lui qu'il obligeait à des contorsions odieuses
Non par jalousie, envie, mélancolie ou faim
Non par faiblesse, empathie, ambition et tourments
Non parce qu'aimer est un tour de force fatalement poignant
Je l'ai tué pour qu'enfin il se dissolve
Sans aucune possibilité d'être
Sans aucune possibilité d'être imaginé.