n ami aussi cher qu'ancien
Un jour inventa la roue
Aussi belle qu'utile, sur tous chemins elle roulerait demain
Les rapides et les détournés, les plus rudes comme les plus doux
On la lui envia, on la convoita, on la copia pour finir
Mon ami s'était fait rouler
Son orgueil pâlissait devant les clones défilant du zénith au nadir
Je craignais qu'il ne cherchât l'oubli dernier
Sous un moderne carrosse sur l'asphalte toujours prêt à courir
Je vins aux nouvelles, alarmé
Il était là, juste à regarder couler le temps
Au bord de la rivière en bas de sa maison
Peu effondré, à peine irrité, quasi content
Il remua un orteil en guise d'ablutions
Apaisa mes alarmes, dérida mon tourment
La roue tourne, dit-il, indéniable prodrome
Mobile est sa nécessaire constitution
Comme oublieuse est celle de l'homme
Dès qu'il a la cervelle grippée par une raison
Et le cœur happé par un sentiment énorme
Je veux bien parier là-dessus deux écrous et trois boulons
Entre compassion et componction je ne choisis pas
Après tout mon ami avait toutes les raisons du monde
Pour faire de la réalité du petit bois, n'est-ce pas ?
Et qui sait, la roue tournant
Un jour peut-être inventera-t-il les rêves disciplinés
Peut-être quelque machine propre à nous projeter en des temps
Où nous aurons abandonné la ronde forcenée
Pour faire le tour de nous-mêmes, tranquillement.