i ce texte venait dans une rubrique intitulée « le mot de la semaine », j'aurais choisi « Wauquiez ». Ce personnage qui, il y a quelques jours, squattait tous les plateaux télé pour sa défense sans concession de la droite, se retrouve aujourd'hui bassement attaqué. Pourtant il à tout bon, Laurent Wauquiez.
Rappel. L'intéressé est sorti de l'ENA haut la main – promotion Mandela, ça s'invente pas. En mars 2001 il sort, donc, fin 2001 il entre direct au Conseil d’État. Papa directeur de la filiale scandinave de la banque Indosuez (groupe Crédit Agricole), puis gérant d'une société d'investissement, maman maire sont tout à fait satisfaits de la réussite à la force du poignet du petit prodige. N'oublions pas les remerciements dus à Jacques Barrot, centriste penchant très à droite, qui le repéra en 1997. Le petit Wauquiez avait 22 ans. Décidément enchanté de ses prestations, Barrot, l'intègre comme suppléant en 2002.Wauquiez aurait quand même connu l'enfer du travail en Égypte, durant quelques semaines. Il a organisé l'Interville local, jeu télévisé apprécié des poètes et des ménagères de moins de cinquante ans.
A part ça, la lessiveuse politique a fonctionné. Wauquiez est tombé dedans tout petit.
Au fil de ses précieuses pérégrinations politiques, il est passé au conseil d’État. Parti au bout de deux mois. Une carrière n'attend pas. Il touche pourtant aujourd'hui les dividendes de ce stage-éclair. Vingt-et-une années de retraite supplémentaires.
Pourquoi persister quand l'essentiel est acquis, en effet ? Wauquiez était social-dem durant ses études, il cocha la case de droite dès la sortie.
Il n'oublia pas non plus de montrer patte blanche à nos amis et néanmoins maîtres, les USA. Il intégre la promo 2006 des « Young Leaders » de la French American Foundation, organisme ayant pour vocation souterraine de sélectionner les élites compatibles avec le fil hégémonique toujours tendu par les USA. A 31 ans, Wauquiez Laurent est reçu haut la main, comme toujours.
Il deviendra député, maire puis secrétaire d’État. Toujours dans l'élite de l'UMP puis LR, aux côtés de l'incontournable Fillon. Déjà, doit-on dire toujours prêt pour enfiler le costume de responsable suprême, et peu importe le domaine, il est tout terrain avec sa carte ENS et ENA.
Cette carrière aussi admirable que pressée l'a conduit a fustiger très tôt l'assistanat, « cancer de la société française ». L'« assistanat » a été repris, banalisé dans toutes les sections UMP et frontistes de France et de Navarre. Il faut dire que des assistés il y en a de plus en plus dans cette France que les millions déversés par camions sur le Medef n'arrivent pas à sortir de la misère. Et il faut bien reconnaître que la plupart, comme dit Macron - autre grand homme à la carrière impérative -, sont des feignants qui cultivent leur assistanat au CDD, au SMIC, au temps partiel ou au RSA. Tandis que Laurent Wauquiez, lui, s'est fait sans entregent aucun, sans tarder et sans traîner. Ni traîner, d'ailleurs, du côté du travail.
Aux jaloux qui verraient quelque petite similitude entre les assistés que fustige Wauquiez et Laurent qui encaisse 21 ans de tranquillité cossue pour deux mois de taf, on répondra que Wauquiez et Laurent ne font qu'un dans sa tête où tourne sans doute en boucle, depuis la fin des études, quelque chose qui ressemble à cette définition du libéralisme intemporel :
« ...un homme se comporte « rationnellement » quand, libre de tout préjugé, de toute superstition, de toute passion négative, il entreprend d'agir conformément à son intérêt bien compris, tout autre critère de la rationalité des conduites humaines étant privé de sens ».*
*Jean-Claude Michea, Impasse Adam Smith. Brèves remarques sur l'impossibilité de dépasser le capitalisme sur sa gauche Climats, 2002, p. 35 – Opus cité dans Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques, L'Echappée, coll. Frankestein, dir. Biagini, Carnino, Marcolini.