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Alain Lasverne.

Alain Lasverne.

petits pas, obstinations diverses


Chant de la neige souillée

Publié par alainLasverne sur 9 Octobre 2014, 11:06am

Chant de la neige souillée l'aube, nous nous en souvenons

Nous l'avons gravé dans cette pierre

Remontée de bien plus bas que les saletés nucléaires

Ils sont arrivés à l'aube

 

Nous n'attendions rien sinon que force revienne

En nos membres, en nos têtes, en notre patience belliqueuse infinie

La République des Territoires d'outre-Monde

Avait le dos rond et l'estomac creux

Nous venions de loin, d'un temps

Dans nos têtes déployé, incarné, augmenté

Nous venions là, sur cette lande sans âme

A la vérité nous y étions déjà depuis longtemps sans savoir le pourquoi du vide

De notre silence, de notre stase

 

La plaine a brûlé soudain de partout, sans raison, sans oraison

Alors nos âmes se sont réveillés comme si on avait frappé à nos portes

D'un coup, d'un seul, définitif et bouleversant

Tout autour de nous s'est ordonné la terre et les eaux, comme si de création avions pouvoir

Le fiel et l'ombre sont apparus pour nature merchand

 

Il fallait prendre et rendre, il fallait briser le gel entravant demeuré

Chanter nos angélus païens, nos chants de guerre et notre rivage espéré, tel était le baume

Et tuer, les tuer tous, les éradiquer sans pitié, sans délai,

Oublier même dans notre certitude purificatrice que nous les exterminions

Beaucoup pleuraient au moment suprême, ils tournaient des mots inouïs, des vortex suaves

Sans effet, l'odeur des charognes merchand éventrées saturait le ciel même

Flottaient et flottaient toujours nos couleurs que la suie de la guerre couvrait lentement

Flottaient nos espoirs et notre magnanimité frémissante du sang des barbares

Élevés en damnation et flétrissure

Il fallait tourner dans le sang les contours des temps de paix prochains

Il fallait n'écouter les prêcheurs vérolés appelant le tigre colombe, appelant la laisse paix

Appelant pour couvrir les voix de nos morts, innombrables, morts dans l’œuf des espérances

Souillées, brisées, presque oubliées

 

Ils sont arrivés sans fracas, sans bardas, sans foutraque bordel

Ils sont arrivés sur la pointe ouest des terres, là où le brouillard est destin

Ils ont peu pillé

Ils ont peu parlé

Maigres, grêlés de peau, grands yeux écartés

Les conquérants sournois lançaient des rires sans poids

La langue affable et envoûteuse ils nous investirent sans cesse

Sans cesse, ils avançaient et peut-on faire autrement que reculer devant des étendards de sourires

La fureur de renaître, la traque sacrée du merchand, oubliées

Sans cesse, ils faisaient lit dans nos forts et nos bourgs

A vrai dire, ils partaient très vite, nous laissant amollis, oublieux

 

Un jour, le grand Pavois des Hurle et Vient a hurlé

La surprise et la perte

Nos flammes, nos draperies, nos cornes et nos mantras

S'effilochaient là, dans la pluie, dans la suie morte et la terre qui gelait

Pavois des Esprit mutants lui répondit d'au moins dix lieux le même désastre

Pavois Détente en flammes répliqua à l'autre bout du territoire

Ils souriaient, ils s'en allaient nos petites vies dans leurs grandes poches

Nous partîmes à leur poursuite, mais peut-on rattraper un clin d’œil, une maligne connivence

Nous récitâmes, éventrâmes charognes alentours, pleurâmes sur nos pieds qui bougeaient peu

Peu attirés, peu réchauffés

Peu parlaient encore

Ils revinrent alors et l’oriflamme sur le cheval gris de tête

Était ficiel, pur merchand

Nous étions roulés, dispersés un à un

La grâce et la fureur s'étiolaient au crépuscule

Il faudrait encore longtemps

Il faudrait encore

Il faudrait.

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