e n'ai jamais voulu ça, ni le reste d'ailleurs. On m'a répété qu'untel c'était de la musique, et l'autre pas. Qu'untel c'était la pensée, et l'autre la fausse pensée. Qu'untel c'était le sexe et l'autre le purgatoire. Qu'untel savait les cimetières, ou l'odeur d'une bouche de seize ans. Qu'untel ne pouvait rien imaginer dans ses neurones de monstre déformé qu'être si pareil, tout pareil à ses monstrueux frères.
Que c'était nous l'harmonie et les autres le bruit. Que lui, elle, eux nous les voyions, mais l'autre pas, plus, jamais. On m'a empli les oreilles et j'ai acheté. On a martelé mes moments de faiblesse, à peu près constants, que tels sons, telle face et telle posture arrêtaient l'Histoire. On m'accordait la génuflexion et les images véritables du monde, du monde réel, tu entends. Tu entends, tu as l'argent pour ça, et pour ça seulement, on m'a dit. J'ai acheté.
Les ennemis de ma liberté de colorier le monde qu'on a placé dans ma chambre, au-dessus de mon bureau, n'existaient plus. D'ailleurs ils étaient rouges comme leur propre sang. D'ailleurs, il n'y en avait pas, nulle part. Une chimère, une hallucination, une hystérie collectiviste. Il était absolument impensable dans tous les univers possibles de ne pas voir les glaces à l'eau sur la plage et les taches de rousseur sur les planches de surf. Il relevait de la toute première urgence d'oublier les éclats de soleil dans le goudron qui se soulevait pour compter les jours du mois de Mai. De toute urgence il fallait certifier à chaque seconde qu'au pays de la lumière, de la foi et de l'ordre, on ne pouvait mordre l'espoir et la jeunesse que tous nous étions sous les sunlights. De toute urgence, il fallait penser les mêmes urgences qui ne sauraient se régler sans un achat massif, universel, indubitable d'une même Chose qui serait tout simplement le monde, avec le bonus Vie, en kit.
Alors après, il y a eu comme un après. Après que les choses se soient arrêtées, ou presque. Elles ont ralenties, les choses, comme ces bêtes épuisées en gros plan télé, épuisées de voir leurs désirs animaux pas satisfaits tout de suite, croquer, cris et sang. Alors oui, c'était un peu fini tout ça. Dommage, je savais bien imiter à ce moment. Je n'imitais même plus, j'étais l'être de la chose et la chose même dans l'être. Sans manuel aucun entre les cuisses de l'imitatrice qui avait été choisie par la pensée calibrée de ma liberté pour imiter le sexe avec moi. Sans traducteur et menuisier non plus derrière les porte-voix et après les coups de marteau sur le monde tel qu'il a le devoir d'être devant mes yeux bien droit braqués.
Personne ne m'avait prévenu qu'il y avait un après, que le duvet sur les avant-bras des héros blanchissait. Personne, pas même moi, n'avait assuré les pierres et les rimes, les discours et les hymnes, le sang et la douleur. Personne n'avait vu le monde foutre le camp en bateau ultra-rapide, se barrer comme une fillette sans se battre, sans dire qu'aujourd'hui on changeait de visage pour refaire le monde comme il n'avait plus le droit d'être depuis si longtemps déjà.
Alors, on a vu traîner des choses et même des vivants hier morts. Des ersatz, d'ailleurs je savais que ça existait. Ersatz, ça sonnait faux et rouge, ou Her Satz.
J'ai voulu partir dire que post non, ni après, ni plus tard, ni bleuet. J'ai voulu rester là, bien dans le monde, mais les chevilles ont branlé, la lumière même n'était plus photoniquement traçable. Je la regardais et je me demandais si ce n'était pas des reflets comme des reflets dans l'eau translucide, presque crémeuse de la piscine le 6 Août de l'été de tous les étés, celui qui arrête le monde quasiment à jamais, figé devant tant de perfection. Donc, le monde ici et maintenant ou le monde d'après. D'après quoi, c'est pas à demander. Imiter, présent. Imiter, that's all. D'après quoi, je t'en pose des questions ?
Je sais, non, je ne sais pas, mais j'achète des livres qui savent. Je commence à savoir bien à mon tour. Post et tout ça, et après, et pop et no machin-no chose, conceptno et pop et sub-dissimulation de changement rouge. C'est pas demain, c'est pas hier, c'est des construits nouveaux, qu'on me dit, et j'ai bien compris, et je me sens mieux, qu'on me dit, vrai de vrai, c'est présent aimant, armes de dissimulaction massive de vie. Ça va, c'est rien.