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Dès 2013 le dirigeable médiatique s'est posé sur 2017 et n'arrête pas de nous tirer hors du réel vers cette élection prochaine. La temporalité médiatique décalée est le carburant de l'hyperéalité politique actuelle. Hyperéalité généralisée qui a pris sans doute naissance avec l'apparition et l'essor de l'outil technico-scientifique globalement nommé Raison. Les Lumières et leur esprit nouveau, comme perception conceptuelle et synthétiques du Réel, organisant une mise à distance progressive du réel, de cette aporie nommée chair et barrières que le monde nous pose, à commencer par notre finitude.
Sous la surface brillante le réel et le temps continuent pourtant leur œuvre et nous débouchons effectivement sur une élection.
Élection
Elle est cruciale. Le théâtre politico-médiatique est tellement vermoulu qu'on entend les craquements de la charpente. L'hyper-réalité qu'il dessine pour nous perd des couleurs et de la substance chaque jour. Les acteurs jouent faux, leurs costumes ne leurrent plus personne, leur discours n'a plus aucune chance de séduire. Leurs rôles sont usés à la trame, mais toute la troupe se porte à merveille, cultive une arrogance sans faille que le famélique public ne goûte plus du tout.
Surplombant le théâtre, des menaces planétaires continuent à hypothéquer notre mode de vie, sinon notre existence même. Bourses en lévitation, environnement extrêmement dégradé, choix énergétiques potentiellement mortels, terrorisme croissant en intensité et gagnant chaque année de nouveaux pays, dont l'Occident qui se croyait à l'abri.
Balayage idéologique
Écartons les faux et impossibles choix.
Option révolution : improbable à l'heure actuelle. L'air libéral que nous respirons depuis si longtemps a tué la conscience de classe ou presque. Une grande partie du prolétariat a adopté l'individualisme prôné par les maîtres. Aliénation logique, dans un système capitalisme hyper performant pour les mirages comme pour les produits. Tout est possible dans un contexte d'effondrement émergent du système, mais les conditions ne semblent pas réunies, même si ce genre de prédiction s'est vu infirmé il y a près de cinquante ans.
Option conservatrice. Fillon et autres Le Pen : impossible retour vers une économie qui tenterait de réaliser ce qui a déjà été fait, en pire. Une politique à la Thatcher, pour aussi violente qu'elle fut, est dépassée par l'aggravation de l'exploitation actuelle. Les classes populaires sont aujourd'hui, les stats de la pauvreté, au taquet pour survivre. Corruption structurelle, liée au statut des représentants et aux interlocuteurs prioritaires, financiers et industriels.
Option souveraino-autoritaire : malgré un affichage altermondialiste, le FN est un parti libéral qui adore l'autorité incontestée et déteste tout ce qui est protestation dans la rue. Bref, ne supporte pas l'agitation démocratique du peuple qu'il prétend défendre. Indice : il n'a pas peur, en refusant l'augmentation du SMIC, de la contradiction entre son discours populiste et ses hauts cris pour cette France de paysans et d'ouvriers qui s'enfonce justement à cause de revenus sans cesse rognés. Corruption en cours, qui commence à émerger. Tentation revendiquée pour le tout-sécuritaire.
Option ultra-libéralisme larvé. Le PS et ses alliés. Prorogation de la méthode de gouvernement actuelle, avec un mix sécuritaire-libéralisme assumé. Le résultat est tout défaillant en termes d'emploi, de filets sociaux. Les français dans leur immense majorité ont perdu en pouvoir d'achat ainsi qu'en sécurité économique et sociale. Corollaires: prééminence aggravée du patronat, maillage serré du territoire par les forces de police. Contexte : chute des classes populaires dans la misère et évaporation des classes moyennes, qui voient leur schème d’ascension s'évanouir et leurs statuts comme leurs revenus fondre à vue d’œil.
Reste deux choix majeurs, si l'on veut rompre avec la pratique, les discours et programmes qui nous enfoncent dans une crise qui n'en finit de renaître plus forte depuis l'initiale crise du pétrole des années 70.
Abstention ou Mélenchon
Deux positions aussi raisonnables que dominantes, à la Gauche où je me situe. L'une allant vers la fin du combat faute de combattant. Perspective, la fin du système par implosion, crise évidente de représentation et blocage par absence de liquidité. Liquidité entendue comme manque total de votants de bulletins et de votants. Cette abstention très dominante, voire totale provoquerait l'arrêt de la mécanique électorale. A condition qu'elle opère un saut quantitatif, donc qualitatif dans les esprits, de droite comme de Gauche.
L'autre position postule le retour d'un socle collectif à la base de la représentation. Une option de quasi-rupture avec un panel de politiques en lévitation, sans presque de comptes à rendre et de plus en plus indépendant de leurs promesses. La pierre de touche du programme Melenchon étant la mise en œuvre immédiate d'une Constituante devant révoquer les lois organiques en vigueur pour rendre les clés au peuple, avec les conséquences sur les institutions, les traités, la verticalité générale de la société. Ce, dans un appui sur le passé révolutionnaire pour entrer dans un avenir où la base de l'organisation politique, partant de l'économie, serait profondément bouleversé, si la Constituante est mise en route, appliquée et déclinée. Si cette déclinaison séduit l'électorat populaire au-delà des limites de Gauche, pour s'adresser au prolétariat dans son ensemble.
Le tableau ci-dessous tente de sérier les avantages et inconvénients des deux choix, d'un point personnel et social à la fois.
L'idée est évidemment d'aider chacun à prendre sinon un engagement, du moins position pour l'un ou l'autre.
ABSTENTION |
MELENCHON |
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Gains |
Pertes |
Gains |
Pertes |
Adéquation entre action globale et perception générale (« tous pourris »)
équilibration de l'action. On prive les élus de bulletin comme ils privent les gens de citoyenneté
interruption active et synthétique de l'institution du vote ; elle traite système, acteur et inter-actions en une seule (in)action,
expulsion symbolique à la fois des représentants et du mode de représentation
aversion anti- « système » incarnée d'une manière simple et concrète - sans argumentation nécessaire, pour ceux que le discours intimide ou révulse
expulsion des hommes et modalités perçus comme néfastes et rejetés globalement
radiation radicale de la représentation, voire de la société ; société dont les élections sont perçues par certain(e)s comme un rouage pervers d'une entité sociale complètement hostile |
Dilution du positionnement, entre désintérêt, refus liée à des raisons/motivations diverses pas forcément communes
privation de choix/adhésion à un programme et un candidat avec son bulletin
privation de la possibilité de défavoriser activement un candidat avec son bulletin
auto-exemption de la fonction citoyenne majeure, aujourd'hui
auto-exclusion qui peut être perçue socialement comme facilité, mollesse sans raison valable devant le devoir électoral
frustration possible de ne pas s'impliquer dans le développement d'une vision d'un autre monde, d'un programme autre, mais d'être dans un refus sans contrepartie, si ce n'est de susciter quelques réponses et malaises
action sans résultat tangible : le système est affaibli par une amplification de l'abstention mais reste inchangé
échec face au changement du système, puisqu'on ne met pas un homme/représentant en situation de changer les choses |
Valorisation de soi : la citoyenneté active – discussions sur le politique, les politiques, l'avenir citoyen, distribution de tracts, réunions de groupes, etc. -
adhésion/fusion de l'individu dans le groupe : protection,sécurité redoublement/renforcement des convictions
intégration par le militantisme dans la société politique, citoyenne, civile
action/création de sa réalité, son rêve en discutant/participant à une nouvelle construction théorique et pratique
transformation politique potentielle par la réalité des programmes/projets qui lève une espérance et une attente puissantes
implication populaire centrale notamment par la constituante promise dans le programme/projet France insoumise
transformation virtuelle des institutions, donc de l’État, par la prise en main du fondement de l’État (constitution) par les citoyens |
Prorogation du système, indépendamment du changement potentiel ; on alimente de fait, en votant un système qu'on voudrait changer
spéculation hasardeuse ; voter pour un programme, un homme est un pari sans garantie de succès
réalisation incertaine de tout ou partie du programme (comme de tous les programmes) : quelle est la volonté réelle des responsables du projet France insoumise ?...
mobilisation difficile et pourtant nécessaire de l'électorat pour un programme et un homme de Gauche dans un contexte de propagande puissante et d'arasement de la citoyenneté
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